Photolim87 - Espace de discussion

Annonce

Les prochaines réunions Photolim87 :
  • Prochaine réunion mensuelle : jeudi 11 mai à partir de 19h à Quorum
  • Photolim87 - l'espace de discussion

    les photos présentes sur ce site et sur ce forum ne sont pas libres de droits et appartiennent à leurs auteurs respectifs.

    Vous n'êtes pas identifié.

    #1 09-02-2007 11:52:37

    Aurelien
    Amateur de poils
    Lieu:Pierre-Buffière
    Date d'inscription::09-06-2006
    Messages: 2,916
    Site Web

    On commence à en revenir

    Photo, quand on abandonne le numérique

    Fin 2004, je fermais ma «parenthèse digitale». Elle aura duré un peu moins d’un an et demi. Analyse.

    Quand on abandonne le numérique...

    Pouvoir maîtriser toute la chaîne. De la prise de vue au tirage. L’idée était certes séduisante. Alors j’avais craqué. Début 2004, je remisai mes vieux boîtiers argentiques et achetai un reflex numérique. Au début, c’était un peu comme une lune de miel, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Puis, peu à peu, les choses changèrent, l’enthousiasme était retombé. Je crois que ce qui m’ennuyait le plus avec le numérique, c’était le côté "tout, tout de suite". Trop égale bizarrement moins. C’est comme avec l’Internet, un puits sans fin, tu peux tout avoir dans la seconde... Mais a-t-on besoin de tout dans la seconde ? Je crois que tout cela (en gros les technologies numériques) extériorise ou délocalise quantité de choses que l’on peut très bien gérer dans sa petite tête. Faire tourner ses méninges, spéculer, manier des idées, des formes en "interne" est une expérience des plus utiles et enrichissantes. Mesurer la lumière, réfléchir à l’interprétation d’une mesure, être « à son ouvrage », concentré. Dés lors que des machines se chargent de tout cela à notre place, je pense que cela nous amène tout doucement à reléguer ces fonctions pourtant vitales. Un jour, il y a des années, un directeur artistique m’a dit un truc qui m’a marqué : nous parlions de l’informatisation de la mise en pages. Il m’a dit que la maquette colle/ciseaux permettait paradoxalement plus d’audaces, car dans sa tête, on n’a pas de limites. Si tu commences à travailler sur un logiciel, c’est lui qui t’impose son horizon. C’est comme la photo numérique, ou la musique électronique, mais je connais moins bien ce domaine. Quand tu as 36 vues (au début en plus) ou 12 et une seule optique par exemple, et quand tu utilises un appareil manuel, tu gères les différents paramètres et les différentes combinaisons, ainsi les choix que tu prendras influenceront le résultat (grande ouverture, petite profondeur de champ, sous-exposition, ombres denses...). Un appareil automatique est bien incapable de faire cela. Il donnera une photographie nette et bien exposée, un calcul moyen, sans faute... Mais sans aucune audace, ni style. Déléguer ces choix techniques, qui modèlent l’image à un processeur, c’est comme abandonner à un logiciel l’écriture d’un poème ou d’un roman. C’est absurde sauf si ce qu’on recherche est une photo-souvenir ou une petite note.

    La deuxième chose qui me gêne considérablement avec le numérique, c’est ce que j’appelle la discontinuité matérielle : dans une photo analogique, tout comme dans le disque vinyle, il y a empreinte, c’est plus proche en fait de la peinture rupestre que ne le sera jamais une photo numérique, qui n’est et ne sera jamais qu’une traduction, une conversion de photons (qui sont des particules de matière) en 1001010010100101001010010100100010. Perte de contact, binaire-de-rien, tout cela ne s’incarne pas, aucune matérialité. Envolés l’empreinte, le sceau de la lumière... Et je trouve que ça se voit. Trop net, trop lisse, pas assez de matière, pas de support (et pour cause). Quand les hautes lumières surgissent ça crève, ça décroche. Pas bon. Avec un négatif, si tu veux trouver de la matière, il y en a toujours, il suffit de la faire « monter ». Alors oui, bien sûr, on peut bricoler, en créer, et même du grain. Mais bon, mais quand on rentre trop en cuisine, c’est souvent un cache-misère.

    Last but not least : l’image latente (l’attente), le temps, le rapport au temps. Moi qui suis un vrai impatient, un nerveux et un angoissé, l’appareil numérique n’était pas bon pour moi. Boulimie : l’été, je passais mon temps à faire des photos. A en oublier les autres, la famille, les amis. Le soir, je me retrouvais devant mon Mac à retoucher les images du jour... Les photos se suivaient et finissaient un peu toutes par se ressembler. Des clones de clones : qu’en reste-t-il , au bout du compte ? Pas plus de bonnes photos, plutôt moins d’ailleurs, le trop nuit au bon, le mieux est l’ennemi du bien. Je viens de retravailler sur des négatifs, des séries faites en 1993 au Portugal. Je m’aperçois que c’est capital de prendre du temps (bon, onze ans, c’est abuser !), quelques semaines, le temps de développer et de faire les planches contact, ça laisse le temps à la pulpe de se redéposer, ça laisse le temps d’oublier un peu, de laisser l’émotion passer. Oublier pour mieux redécouvrir et éprouver sa mémoire. Les photographies, disaient les Indiens, ce sont des miroirs qui se souviennent... Un peu plus de réflexion au moment de la prise de vue, plus d’effort mental, une bien meilleure qualité, et enfin du temps. Que demander de plus ? Je repose donc cet appareil étrange qu’il fallait en plus réveiller pour faire la moindre photo. Au revoir les images-minute, revoici l’image latente, son grain de peau incomparable, ses caprices et ses humeurs, ses certitudes déçues et ses surprises inattendues. J’ai repris mes Leica, indémodables appareils, spartiates d’entre les spartiates, fidèles soldats. Acier poli et horlogerie germanique contre plastique et circuits imprimés. Quand tout devient trop confortable, trop immédiat, trop à portée de main à tout instant, la créativité, animal difficile, fout le camp. Il faut donner de soi, apprendre à attendre pour re-ce-voir. Je ne serais pas étonné si cette réflexion pouvait s’étendre à la musique et à quantités d’autres choses. Je ne serais pas en outre surpris que se noue là un problème plus profond de notre modernité.

    VM

    J"ai trouvé ca sur le net, je trouve ca très interessant comme contribution...


    "Ne te lance dans un projet que si celui-ci est particulièrement important et presque irréalisable". (Edwin Land)
    http://www.aurelien.jepose.com
    La boutique de Labo-Argentique.com

    Hors ligne

     

    #2 09-02-2007 12:37:51

    Gil
    Invité

    Re: On commence à en revenir

    En effet très intéressant wink
    Déjà le titre est très poétique... je croyais que c'était le titre d'une photo que tu allais publier! dommage avec un titre comme ça (pqoi pas le thème d'un prochain challenge big_smile )
    Pour le reste, il y a des choses que je partage , d'autres moins.
    Pour le "bof-bof", il y a le jugement sur la qualité.
    C'est bête à dire mais fin 2004 le numérique balbutiait encore.
    Les histoires de hautes lumières, actuellement ca se récupère bcp mieux en numérique et les dégradés de plus en plus fins.
    Le coup aussi du "si c'est trop facile, on réfléchit plus" c'est assez caricatural.
    Personnellement j'ai beaucoup appris au cul de l'appareil.
    Quand la photo est ratée tu vas pas rappuyer sans apporter une correction, donc tu apprends , tu calcules.
    C'est sur je pourrais aussi le faire en amont, longuement théoriser ma prise de vue, mais bon ça n'évites pas toujours certaines plantades visibles uniquement au labo!
    Son gout du vinyl va de pair...
    Je préfère les subtilités d'un enregistrement numérique que les grésillements d'un vinyl, là aussi c'est question de philosophie.
    Par contre je suis un peu d'accord avec l'image latente.
    Mais personnellemnt cela ne m'empeche pas de laisser murir mes photos.
    Souvent (sauf si je suis impatient) je laisse murir les fichiers et je les reprends ensuite.
    Regarde mon exemple du parc Thuillat, elle datent de 6 mois au moins.

    Ce qui m'agace plus c'est que l'argentique s'élève toujours en marty et le numérique en méchant pas beau!
    Arrêtons ce manichéisme stupide.
    Moi j'adore certains boulots en argentiques et d'autres en numérique.
    C'est l'émotion que je ressens (ou pas roll ) en voyant une photo.
    Je m'en contrefout qu'elle est été faite en numérique ou argentique.
    Aucun photographe en numérique ne viendra jamais "cracher" comme ça sur l'argentique avec des arguments de ce genre.
    Donc qui sont les photographes les plus ouverts et tolérants dans cette "guéguerre"?

    Dernière modification par Gil (09-02-2007 12:38:55)

     
    Utilisateurs enregistrés sur cette discussion: 0, invités: 1
    [Bot] ClaudeBot

    Pied de page des forums

    Propulsé par FluxBB
    Modifié par Visman

    [ Généré en 0.059 secondes, 12 requètes exécutées - Utilisation de la mémoire: 2.57 MiB (Pic: 2.77 MiB) ]